Les toreros si ils ne sont pas tous artistes, ont tous à voir avec l’art… Et au de là d’une approche technique indispensable et incontournable, réglée à l’aune des canons et des préceptes d’école, il semble qu’on puisse tenter l’exercice injuste et partial qui consisterait à proposer des ponts avec la littérature, des rapprochements avec la peinture ou des juxtapositions avec la musique. Juste comme ça pour éclairer autrement et ouvrir sur un ailleurs à s’inventer…
Aux vendanges à Nimes, par exemple, il est apparu comme une évidence que Espla, se situait quelque part entre Chaissac et Chagall, la force et la maîtrise simple de l’un et les envolées lyriques et joyeuses de l’autre, la simplicité sans esbroufe des deux. Des couleurs simples, des traits et des formes clairs aussi pour dessiner quelque chose de résolument jubilatoire, tout en prenant le risque de la générosité et de l’abandon. Aparicio, hors quelques croquis prometteurs à la cape, ce jour là avait plutôt à voir avec un Vlaminck sombre et mal inspiré, avec ses gros coups de pinceaux, sans grâce qui occulte le sujet en le surchargeant, le fardant de gestes inutiles, prenant les vessies surchargées et prétentieuses pour des lanternes éteintes.
Quant à Ponce, ce jour là, il ne fut pas loin de retrouver la simplissime et douce puissance d’un trait ou d’une ligne du Miro dernière période (on pense aux toiles de la fondation de Barcelone). Ou peut-être avait-il quelque chose à écrire avec Jean Echenoz, cet écrivain qui avec des phrases « traits » courtes, des juxtapositions de paragraphes au contenu en apparence anodin, des livres courts loin de l’exhaustivité d’une bio officielle, finit par présenter, mine de rien et sans forcer, mais avec beaucoup de précision, un portrait vivant et juste, d’une présence et d’une densité, d’une authenticité plus vraie que vraie.
C’est aussi pour ça que la corrida des vendanges fut très belle.
